GALERIE 
            DES JEUNES VIERGES ,
          ou 
            
          MODELE 
            DES VERTUS
          qui 
            assurent le bonheur des femmes ; Par Mme DE RENNEVILLE ,
          Auteur 
            de plusieurs ouvrages d'éducation.
          avec 
            quatre jolies gravures.
          
             
              | Ouvrage 
                  destiné aux jeunes personnes de tous les états 
                  ; où l'on prouve, par des exemples, qu'un cur pur 
                  est le premier des biens ; qu'il est le garant de toutes les 
                  vertus chrétiennes et des qualités sociales ; 
                  que l'innocence des murs, appelée sagesse, fait 
                  la bonne fille, l'épouse respectable, ainsi que la bonne 
                  mère ; qu'enfin elle assure aux femmes des jours heureux 
                  dans la vieillesse la plus avancée. | 
          
          Paris.
          D.Belin 
            , LIBRAIRE - Quai des augustin, N° 11.
          1827.
          
             
              |  |  |  |  | 
             
              | Sainte 
                  Genevieve. | Ursulines 
                  allant au Canada. | La 
                  Rose de Salency. | Mesdemoiselles 
                  de Saint-Janvier. | 
          
           
          Madame 
            la marquise de Lisois, veuve, belle et jeune, après avoir joui 
            d'une très grande fortune, se trouva réduite, tout à 
            coup, à n'avoir pour tout bien qu'un terrain en friche de quelques 
            arpents. Elle le fit valoir elle-même, et vécut de son 
            produit pendant plusieurs année.
            Ce petit domaine était situé dans les environs de Salency, 
            terre dont les ancêtres de cette dame avaient été 
            seigneurs. 
          La 
            marquise aimait les bons Salenciens ; elle venait même quelquefois 
            se mêler à leurs jeux, sans que cette aimable familiarité 
            diminuât le respect qui lui était dû. 
          Veuve 
            avant vingt ans, madame de Lisois ne voulut plus rentrer dans les 
            liens du mariage. Mais la régularité de sa conduite 
            et la vérité de ses discours lui attirèrent partout 
            des amis et des admirateurs. Tout en elle annonçait une personne 
            d'un rang distingué : son port majestueux, ses manières 
            nobles, inspiraient le respect ; et ses vertus la vénération 
            : elle s'emparait des curs par son excessive bonté, sa 
            simplicité pleine de charmes, auxquelles étaient jointes 
            une gaieté franche soutenue et une bienfaisance sans bornes.
            Cette respectable dame, ayant recouvré une partie de ses biens, 
            n'en renonça pas moins aux sociétés dans lesquelles 
            son rang lui prescrivait de vivre. Elle abandonna les plaisirs dangereux 
            des grandes viles, plaisir si séduisants pour la plupart des 
            jeunes personnes de son âge.
           
            Elle acheta un château près de Salency, et s'y fixa. 
            Elle consacra le revenu de ses terres à l'instruction de douze 
            jeunes filles pauvres ; lesquelles devaient être élevées 
            avec soin dans des professions utiles. Celles-là pourvues, 
            elles étaient remplacées par d'autres. Madame de Lisois 
            se faisait toujours accompagner de six jeunes filles, vêtues 
            de blanc, et prises parmi les plus intéressantes de ses protégées.
            Les choses étaient en cet état, lorsque la marquise 
            reçut la visite d'une de ses amies. Blanche de Courtenai, très 
            jeune dame, avait été pensionnaire avec madame de Lisois 
            : mariée presque au sortir de l'enfance à un riche seigneur, 
            favori du prince, Blanche, dans le tourbillon du monde, avait oublié 
            l'amie chérie de ses premiers ans. 
          Une 
            circonstance les ayant rapprochées, Blanche vint au château 
            de madame de Lisois ; elle y coucha. Dans une de leurs conversations, 
            Blanche témoigna sa surprise à cette dame de ce qu'à 
            son âge elle s'ensevelissait ainsi toute vive. " Et moi, 
            lui répondit la marquise, je vous plains, puisque vous êtes 
            obligée de vivre à la cour. Je veux, mon amie, ajouta-t-elle, 
            vous donner le secret de mon bonheur, en vous faisant connaître 
            mes occupations et mes plaisirs ; pour cela, il faut que vous consentiez 
            à rester ici quelques jours. " Blanche accepta de bon 
            cur l'offre de madame de Lisois.
            Le lendemain, la marquise conduisit son amie dans une grande salle 
            longue, remplie de tableaux, où était sa bibliothèque 
            : " Quel coup d'il enchanteur ! s'écria Blanche, 
            en y entrant ;mais ma chère marquise, c'est un trésor 
            que cette galerie !- Elle est précieuse, en effet, dit madame 
            de Lisois, non par la beauté des peintures, mais bien par les 
            sujets que ces peintures représentent : C'est la galerie des 
            vierges.
            Les vertus des saintes filles que vous voyez m'apprennent à 
            mépriser les vains plaisirs du monde. Cette galerie est un 
            livre toujours ouvert qui m'avertit de mes devoirs. La vie de ces 
            anges, qui est dans ma bibliothèque, set de règle à 
            ma conduite ; et la récompense qu'elles ont obtenue est pour 
            moi un puissant motif d'encouragement. Mais, repris Blanche, il y 
            a d'autres filles que des saintes : voici des rosières du côté 
            opposé. Ce 
            sont aussi des vierges, répondit madame de Lisois, et, de plus, 
            toutes française, la plupart nées au village ; lesquelles 
            ont eu le prix de la sagesse, et dont j'ai recueilli avec soin les 
            portraits.
            Si celles-ci n'ont pas le titre de saintes, elles ont cependant les 
            vertus qui mènent à la perfection. Moins parfaites que 
            les premières, elles sont aussi plus faciles à imiter. 
            Les vertus domestiques ont peu d'éclat ; elles font pourtant 
            le bonheur des familles. Toutes les femmes ne sont point appelées 
            à la vie contemplative, au lieu que toutes ont à remplir 
            les devoirs de l'état dans lequel Dieu les a placées. 
            Elles ont des droits au respect et aux hommages, celles qui, dans 
            la retraite et au sein de leurs familles, se conduisent avec une grande 
            régularité, se rendant digne des âmes tendres, 
            qu'une suite de combats et même de victoires.
            Laissons le jeune homme s'enorgueillir des lauriers cueillis par son 
            père, mais arrosés des larmes de l'humanité ; 
            quant à nous, arrêtons nos regards avec complaisance 
            sur les jeunes filles qui ont mis toute leur gloire dans la sagesse 
            de leurs mères, et qui, en suivant leurs exemples, se sont 
            rendues dignes de la rose.
            " Jamais l'antiquité n'offrit rien de plus respectable 
            que la fête de la rose ; non, la sagesse n'est point bannie 
            de dessus la terre ; elle y est même couronnée : mais 
            pourquoi faut-il que ce soit seulement au village !
 Une simple 
            couronne de roses, accordée tous les ans à la sagesse, 
            a préservé quelques coins de la terre de la corruption 
            universelle. Ainsi que les Salenciens, les heureux habitants des communes 
            qui ont conservé des curs purs et la touchante simplicité 
            des champs. La plupart de ces villageois ne sont point des mercenaires, 
            esclave d'un riche fermier, et avilis par l'indigence : ils goûtent 
            les douceurs de la propriété : chacun, attaché 
            à la portion de terre qui lui appartient, la cultive en paix. 
            Dans ces lieux favorisés des regards de l'Eternel, la jeune 
            fille suit les lois de l'austère sagesse sans efforts et sans 
            faste. La femme mariée, toute à sa famille, toute à 
            sa famille, met son bonheur à remplir ses devoirs. L'époux 
            chérit sa compagne ; il soulage la vieillesse de son père, 
            et a toujours l'il ouvert sur ses enfants. Le cultivateur, heureux 
            de son sort, ne cherche point à perdre avec la raison le souvenir 
            de ses peines. Les jeunes gens, entourés de bons exemples, 
            ne connaissent que l'amitié et les jeux de l'innocence. Tels 
            sont, aimable Blanche, les bons campagnards avec lesquels je passe 
            ma vie ; leurs vertus rustiques valent bien les faux brillant des 
            hommes des hommes de cour.
            " J'ai vu donner la rose. Ah ! mon amie, que ne puis-je vous 
            peindre comme je le voudrais cette cérémonie auguste 
            et touchante ! Que ne puis-je vous donner une idée des sensations 
            délicieuses qu'elle a fait naître en moi ! Combien, en 
            ce moment, la vertu me paraissait belle ! Combien la jeune villageoise 
            couronnée m'inspirait de respect, d'enthousiasme ! Quel jour, 
            ma chère Blanche, que celui du couronnement d'une rosière 
            !..